Ils avaient imaginé plusieurs garde-fous dont le vote à deux échelons pour la présidentielle et un gouvernement (président, congrès, cour suprême) où chaque institution pouvaient bloquer les deux autres par un équilibre du pouvoir – baptisé «check and balances» – cher à Montesquieu, principale source de leur inspiration pour la Constitution, car ils préféraient l’inaction à la mauvaise action.
Cela n’a pas empêché dès 1828 l’élection pour deux mandats d’Andrew Jackson.
Cela n’a pas empêché l’élection pour deux mandats de Ronald Reagan en 1980.
Cela n’a pas empêché l’élection et la réélection de Donald Trump.
Oui, les États-Unis ont beaucoup flirté avec le populisme démagogique et extrémiste.
Sans remonter à la présidence fort controversée de Jackson, de 1829 à 1837, un ancien général esclavagiste et antisystème à la démagogie en faveur des petits fermiers et des ouvriers, a-t-on déjà oublié Ronald Reagan et sa présidence marquée par le démantèlement des services publics avec, comme le fait Trump aujourd’hui, la nomination de gens incompétents à des postes ministériels dont il ne croyait même pas à leur utilité et à celle de leur mission afin de saborder les administrations dont ils avaient la charge?
Un Reagan qui s’est appuyé sur une base extrémiste composée entre autres des évangélistes les plus réactionnaires, comme Trump aujourd’hui et dont les compétences pour gouverner ont toujours été questionnées, comme Trump aujourd’hui.
Dès lors, quand un peuple a élu deux fois quelqu’un comme Reagan, il peut élire deux fois un type comme Trump.
Mais Trump est certainement plus dangereux que Jackson ou Reagan, car il est ouvertement contre la démocratie républicaine libérale ce que n’étaient pas ces deux derniers présidents.
De même, ceux-ci ont toujours reconnu le suffrage universel et les fondements même du régime en place aux Etats-Unis à l’inverse de Trump.
De plus, ils ont combattu les ennemis de l’Amérique alors que Trump fait alliance avec eux et menace ses alliés.
Trump est donc un échelon supplémentaire dans le populisme étasunien mais certainement pas une bizarrerie sortie de nulle part.
Et si Jackson était démocrate, le courant populiste extrémiste a depuis migré au Parti républicain où il était déjà embryonnaire dans les années 1970 mais qui est monté en puissance dans les années 1980 et s’est encore renforcée dans les années 2000 avec la présidence de George W Bush pour atteindre son apothéose aujourd’hui.
Seule résistance réellement capable de faire barrage à ce populisme dévastateur, l’aile centriste du Parti démocrate qui a pu gagner les élections de 1992 avec Bill Clinton, de 2008 avec Barack Obama et de 2020 avec Joe Biden (sans oublier la victoire en nombre de voix d’Al Gore en 2000 et d’Hillary Clinton en 2016).
Reste que ce populisme fait également partie de la posture et des discours politiques commun aux deux principaux partis.
Ainsi, à chaque élection présidentielle, leurs candidats qui sont en quête d’une première expérience déclarent que s’ils sont élus, ils iront faire le ménage à Washington et mettront aux pas les politiciens du Congrès ainsi que les bureaucrates des administrations.
Plus curieux, souvent cette même rhétorique est utilisée par les présidents sortants qui se représentent pour un nouveau mandat…