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samedi 9 novembre 2024

L’Editorial d’Alexandre Vatimbella. La victoire de Trump démontre que la démocratie et les valeurs humanistes ne sont pas une seule et même chose


Comme le proclamait Abraham Lincoln sur le champ de bataille de Gettysburg encore rougi par le sang des combattants de la guerre civile américaine, la démocratie c’est le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple.

Cette définition largement acceptée ne dit absolument rien des valeurs que doit défendre cette démocratie au-delà de donner la parole au peuple pour qu’il élise ses représentants (ou qu’il s’auto-administre) pour le servir.

Mais un peuple qui choisit un autocrate qui tourne le dos aux valeurs humanistes est-il légitime vis-à-vis de ce que doit être un régime démocratique?

La réponse est oui.

Il est élu par le peuple telle que la définition le stipule et sa seule mission est de gouverner en faveur de ce peuple qui, ayant choisi sciemment comme c’est le cas aux États-Unis, un ennemi des valeurs humanistes, sera donc servi par rapport à ses attentes et son choix dans les urnes.

C’est pourquoi, comme d’autres, je milite depuis longtemps pour que ce que l’on appelle aujourd’hui la «démocratie républicaine libérale» soit porteuse de valeurs qui garantissent les droits «naturels» des individus, que ceux-ci soient consubstantiels  à celle-ci, voire que l’on change, aussi, le nom de ce régime en cours dans les démocraties du monde entier mais qui ne peut être limité à la définition de Lincoln.

Qu’on appelle ce régime «respectocratie», «dignitocratie», «humanocratie» ou d’un autre nom peu importe, c’est ce qu’il recouvre qui est important.

Un tel régime aurait donc empêchée un Trump d’être élu voire même de pouvoir se présenter (c’est d’ailleurs à ce moment du processus démocratique et électoral que tout ennemi de la démocratie doit être exclu de celui-ci avec la mise en place de procédures contraignantes et accompagnée d’une responsabilité pénale en cas de non-respect des serments de fidélité) tout comme cela aurait été le cas pour Hitler, Mussolini ou Erdogan, par exemple, pour tous les autocrates et dictateurs qui se firent élire par le peuple.

Pour bien comprendre ce qui est en jeu, je reproduis ci-dessous l’éditorial que j’ai écrit en septembre dernier:
Le nécessaire dépassement de la démocratie

Dépasser la démocratie alors que celle-ci est l’objet d’attaques incessantes pour la supprimer et que l’ensemble du projet démocratique est loin d’avoir été mis en place de manière pérenne et, surtout, à être inclus dans le comportement des individus et des peuples qui vivent sous son régime sans oublier que nombre de ses mécanismes ne fonctionnent pas correctement, semble être une fuite en avant et un refus de voir cette réalité.

Avant de la dépasser, ne faut-il pas tout simplement la mettre en œuvre?

Sauf que le dépassement de la démocratie est une nécessité pour sauver les acquis de la démocratie, surtout pour sauvegarder ses principes et les valeurs humanistes qui sont ses fondements.

En fait, la démocratie doit être conceptualisée comme une étape.

Dépasser la démocratie, en l’espèce, ce n’est d’ailleurs pas discuter ses acquis mais, au contraire, affirmer que ses principes et les valeurs humanistes ne se discutent pas, donc ne peuvent être remis en question et évidemment supprimés.

Dépasser la démocratie, c’est aller au-delà et doit aboutir à fonder une «respectocratie» ou «dignitocratie» qui pose les valeurs humanistes liées à la liberté, l’égalité et la fraternité comme non-négociables par le vote du peuple qui demeure néanmoins le pilier de la représentation politique.

Aujourd’hui, il est possible pour un peuple qui vit dans une démocratie d’élire des gens dont la volonté affichée est de détruire la démocratie et qui peuvent y parvenir en récoltant une simple majorité du vote populaire.

Rien de ce qu’est la démocratie n’est réellement sanctuarisé, même ce qui se trouve dans la Constitution d’un pays car tout est rétractable par la volonté du peuple ou ses représentant.

Or la démocratie est «le» régime naturel car bâtie sur des valeurs qui sont «naturelles», c’est-à-dire qui s’attachent à l’être humain dès sa naissance et qui ne peuvent lui être supprimées car elles sont ce qui le définit comme une personne dont le respect de sa dignité et de son individualité ne sont pas négociables même par une majorité de la population, même par une unanimité de la population (celle-ci ne pouvant oblitérer la condition de personne des prochaines générations).

Si c’est bien la démocratie qui a apporté ces valeurs – et qui refuse la loi du plus fort en étant le régime de la loi du plus faible –, celles-ci sont plus puissantes qu’elle ce qui implique que le peuple n’a aucune légitimité à les ôter à quiconque.

Car la démocratie n’a fait qu’établir un ordre qui est le plus respectueux de l’humain et c’est cet ordre qui est l’essentiel et qui doit être inaltérable.

Bien sûr, pas de naïveté sur la possibilité de forces anti-démocratiques et totalitaires de supprimer par la violence un régime démocratique.

Mais déclarer tout régime qui ne respecte pas les principes démocratiques et ne s’appuie pas sur les valeurs humanistes, illégitime est un acte indispensable pour faire en sorte que le respect de la dignité de toute personne soit le fondement même de la vie en société.

C’est pour cela que ce dépassement humaniste de la démocratie est non seulement indispensable mais également la marche «naturelle» de l’Humanité vers le respect de la dignité de chacun de ses membres car aucune preuve morale ou scientifique n’existe pour justifier l’inégalité d’essence et de condition entre les humains.