Dépasser la démocratie alors que celle-ci est l’objet d’attaques incessantes pour la supprimer et que l’ensemble du projet démocratique est loin d’avoir été mis en place de manière pérenne et, surtout, à être inclus dans le comportement des individus et des peuples qui vivent sous son régime sans oublier que nombre de ses mécanismes ne fonctionnent pas correctement, semble être une fuite en avant et un refus de voir cette réalité.
Avant de la dépasser, ne faut-il pas tout simplement la mettre en œuvre?
Sauf que le dépassement de la démocratie est une nécessité pour sauver les acquis de la démocratie, surtout pour sauvegarder ses principes et les valeurs humanistes qui sont ses fondements.
En fait, la démocratie doit être conceptualisée comme une étape.
Dépasser la démocratie, en l’espèce, ce n’est d’ailleurs pas discuter ses acquis mais, au contraire, affirmer que ses principes et les valeurs humanistes ne se discutent pas, donc ne peuvent être remis en question et évidemment supprimés.
Dépasser la démocratie, c’est aller au-delà et doit aboutir à fonder une «respectocratie» ou «dignitocratie» qui pose les valeurs humanistes liées à la liberté, l’égalité et la fraternité comme non-négociables par le vote du peuple qui demeure néanmoins le pilier de la représentation politique.
Aujourd’hui, il est possible pour un peuple qui vit dans une démocratie d’élire des gens dont la volonté affichée est de détruire la démocratie et qui peuvent y parvenir en récoltant une simple majorité du vote populaire.
Rien de ce qu’est la démocratie n’est réellement sanctuarisé, même ce qui se trouve dans la Constitution d’un pays car tout est rétractable par la volonté du peuple ou ses représentant.
Or la démocratie est «le» régime naturel car bâtie sur des valeurs qui sont «naturelles», c’est-à-dire qui s’attachent à l’être humain dès sa naissance et qui ne peuvent lui être supprimées car elles sont ce qui le définit comme une personne dont le respect de sa dignité et de son individualité ne sont pas négociables même par une majorité de la population, même par une unanimité de la population (celle-ci ne pouvant oblitérer la condition de personne des prochaines générations).
Si c’est bien la démocratie qui a apporté ces valeurs – et qui refuse la loi du plus fort en étant le régime de la loi du plus faible –, celles-ci sont plus puissantes qu’elle ce qui implique que le peuple n’a aucune légitimité à les ôter à quiconque.
Car la démocratie n’a fait qu’établir un ordre qui est le plus respectueux de l’humain et c’est cet ordre qui est l’essentiel et qui doit être inaltérable.
Bien sûr, pas de naïveté sur la possibilité de forces anti-démocratiques et totalitaires de supprimer par la violence un régime démocratique.
Mais déclarer tout régime qui ne respecte pas les principes démocratiques et ne s’appuie pas sur les valeurs humanistes, illégitime est un acte indispensable pour faire en sorte que le respect de la dignité de toute personne soit le fondement même de la vie en société.
C’est pour cela que ce dépassement humaniste de la démocratie est non seulement indispensable mais également la marche «naturelle» de l’Humanité vers le respect de la dignité de chacun de ses membres car aucune preuve morale ou scientifique n’existe pour justifier l’inégalité d’essence et de condition entre les humains.
Alexandre Vatimbella