Aux Etats-Unis, on aime ceux qui défient l’autorité de l’Etat.
De Jesse James à Bonne and Clyde en passant par Billy the kid, Dillinger ou Al Capone, les outlaws, les hors-la-loi, ont été et pour certains demeurent des icônes populaires dont on célèbre la légende faite de faits d’armes enjolivés et d’une image quasi-angélique ou héroïque (portée souvent par Hollywood, voire les films consacrés à tous ceux que l’on vient de citer) qui ne correspond à rien de ce qu’ont été ces personnages violents attirés seulement avant tout par l’appât du gain.
La légende du Far-West a évidemment à voir avec cette tradition du «bad boy» populaire.
Mais pas seulement.
Pour un peuple d’immigrés dont les aïeuls se sont souvent confrontés à la loi du fait de leur pauvreté ou de démêlés divers et variés qui les ont obligé à partir de leur pays d’origine pour la grande traversée, on a une indulgence pour ce qui ne sont en réalité, le plus souvent, que des petits malfrats qui n’avaient aucun message particulier à délivrer, sauf peut-être Jesse James qui était un sudiste pur et dur qui n’avait pas accepté pas la défaite de la Guerre de sécession et l’abolition de l’esclavage…
C’est sans doute là qu’il faut trouver la popularité qui a touché Trump depuis de nombreuses années – bien avant qu’il se lance en politique, avec des affaires sulfureuses qui l’on conduit plusieurs fois à la faillite – et qui continue à le porter auprès d’une frange très importante de militants et d’électeurs du Parti républicain après son passage à la Maison blanche et sa tentative de coup d’Etat.
Sondages après sondages il demeure le favori des primaires républicaines et ce malgré les quatre inculpations avec 91 chefs d’accusation qui le touchent sans parler de son passage par la case prison hier dans le cadre d’une de ces inculpations pour une photo anthropométrique et la prise de ses empreintes.
Oui, Trump est un «bad boy» qu’une partie des Américains apprécient et que ses fans – c’est comme ça que l’on doit parler de ses soutiens fanatiques – adulent se gavant de sa légende et refusant la réalité de ce qu’il est.
Ce qui est assez paradoxal, néanmoins, c’est qu’il soit devenu une égérie du Parti républicain qui est à l’origine le parti de l’ordre et du conservatisme.
Et ce n’est pas seulement auprès des libertariens et des suprémacistes blancs d’extrême-droite – nouvelles composantes des républicains depuis la fin des années 1960 – qu’il est populaire mais auprès de beaucoup de ceux qui vénèrent les soi-disant valeurs américaines d’une version de droite du rêve américain où l’heureux élu a, non seulement, forgé sa réussite individuelle grâce à son talent et à sa persévérance mais contre l’establishment, contre les «autorités» fédérales, ennemies acharnées de la «liberté» (c’est-à-dire de s’émanciper des règles sociales présentées comme «socialistes» voire comme «communistes») par ces électeurs devenus trumpistes.
Tout cela n’augure évidemment rien de bon pour 2024 où à défaut de victoire – il semble qu’une grande majorité d’Américains ne veut absolument pas de Trump même si beaucoup d’entre eux sont réticents à voter pour Biden –, sa présence plus que probable en tant que candidat du Parti républicain sera une nouvelle gifle pour la démocratie américaine et la démocratie tout court.
On peut espérer deux choses qui ont toujours été fatales aux «bad boys».
La première, c’est leur outrance dans leur domaine d’activité – la violence pour les criminels, par exemple – qui a fini par lasser une grande partie de leurs fans.
Mais il est difficile de prévoir à quel moment il dépassera le seuil de l’acceptabilité.
La deuxième, c’est la condamnation par la justice car, celle-ci rendure par le peuple américain et en son nom, est le plus souvent la preuve ultime que leurs méfaits n’était pas une épopée du cinéma hollywoodien...
C’est d’ailleurs pourquoi les avocats de Trump tentent par tous les moyens de reporter les procès après l’élection de novembre 2024 et que les procureurs font tout pour que ceux-ci se tiennent entre maintenant et l’été prochain.