Bien qu’il ne s’agisse pas du cas de la réforme actuelle des retraites puisque Emmanuel Macron l’a proposée lors de la campagne présidentielle et que les Français l’ont élu en toute connaissance de cause, il faut se demander si, dans l’absolu, réformer contre le peuple est possible en démocratie.
D’abord, il faut distinguer entre une réforme qui accompagne une politique validée par les électeurs d’une réforme qui serait proposée en dehors d’une consultation et d’une réforme également absente d’un programme électoral mais qui est nécessitée par les événements.
Dans le cas d’une réforme qui a été annoncée et sur laquelle le peuple s’est déjà prononcé, soit directement par un vote spécifique comme le référendum, soit lors d’une élection, il semble que le gouvernement en place dispose de la légitimité démocratique qui ne peut être remise en cause pour procéder à la réforme.
Mais deux éléments peuvent entrer en ligne de compte.
Le premier est un projet de réforme qui s’éloigne largement de ce qui a été annoncé et validé par le peuple.
Le deuxième est le changement d’avis du peuple entre deux élections.
Dans le premier cas, la légitimité est bien entamée mais les aménagements peuvent néanmoins découler d’une nécessité qui est apparue après l’élection et donc être justifié même si une nouvelle consultation serait sans doute la bienvenue.
Dans le second, c’est beaucoup plus compliquée parce que ce changement ne se manifeste que dans les sondages et dans des mouvements sociaux qui n’ont pas la légitimité nécessaire pour remettre en question celle qui vient de l’approbation de la majorité de la population lors d’un scrutin démocratique.
On peut néanmoins se demander si une consultation du peuple peut être décidée afin de renouveler le mandat de porter cette réforme.
Mais, ici, arguments et contre-arguments se télescopent comme celui de savoir combien de temps doit s’écouler pour que les citoyens remettent en cause ce qu’ils viennent de décider.
Est-il possible de voter pour un programme et dès le lendemain se prononcer contre lui?!
Le peuple est sans doute souverain mais dans une démocratie représentative, la seule qui est capable de réellement exister à notre époque, cette souveraineté est donnée pour une période limitée à des représentants comme les députés en France.
Dès lors, si ceux-ci se prononcent majoritairement pour cette réforme, la légitimité de leur vote vient de leur élection et de cette délégation de pouvoir.
Si le peuple change d’avis, il peut alors se prononcer lors d’une prochain élection et élire une majorité qui annulera la réforme.
On peut donc affirmer que ni le sondage, ni la manifestation n’ont la légitimité requise pour remettre en question un vote démocratique.
Dans le cas où la réforme sort tout d’un coup du chapeau du gouvernement en place on peut estimer qu’une consultation populaire est nécessaire comme un référendum.
Quant à la réforme imposée par les événements, la consultation peut être légitime mais la délégation de pouvoir dans une démocratie républicaine représentative peut permettre au gouvernement d’agir si les délais l’imposent.