La liberté d’entreprendre est – malgré les défauts qu’elle charrie si elle n’est pas régulée – la seule qui ait permis à l’Humanité son développement actuel.
Dans les démocraties, pas une entreprise à succès n’a vu le jour dans le giron de l’Etat.
En Union soviétique, ce sont les entreprises d’Etat qui ont été une des causes majeures de son effondrement.
En Chine, pour se développer, les communistes ont du se résoudre autoriser l’entreprenariat privé.
Qu’on le déplore ou non, seule la carotte transcende la volonté humaine en l’espèce.
Peu l’idéalisme et pas du tout le bâton…
Taxer les profits des entreprises est évidemment normal mais on ne peut considérer celles-ci comme des vaches à lait.
Surtout si on veut qu’elle demeure dans le pays ou qu’on souhaite les faire venir, à la fois, parce qu’elles vont créer de la richesse, donc payer des impôts et des prestations sociales, et des emplois, donc des salaires.
Dès lors, doit-on instituer une taxe exceptionnelle et conjoncturelle sur les superprofits réalisés par certaines entreprises depuis le retour en force de l’inflation cette année?
Cette question est débattue dans plusieurs pays avec les pour et les contre.
«Pendant trop longtemps, les grandes sociétés super-riches n'ont pas payé leur juste part d'impôts. Nous allons changer cela avec la loi sur la réduction de l'inflation.»
Cette citation ne vient pas d’une personnalité politique de gauche ou d’un populiste mais du président centriste des Etats-Unis, Joe Biden!
Quant aux centristes britanniques, les Libéraux démocrates, ils estiment que «les méga profits sont une gifle injuste et indéfendable pour tout le monde à travers le pays» même si le gouvernement conservateur a adopté une loi contre les profits exceptionnels mais avec des exemptions.
Et le député MoDem Bruno Millienne peut
affirmer:
«Quand vous en discutez autour de vous, pas une personne ne va vous dire
qu'elle trouve ça décent que certaines entreprises fassent des profits
considérables en pleine période d'inflation, quand les gens ont du mal à
boucler les fins de mois. On ne pourra pas s'exonérer de cette réflexion. Je ne
sais pas si ça aboutira sur quelque chose mais la réflexion sera portée par
tous les groupes à l'automne durant l'examen du budget.
Il faut qu'on trouve un système pour répondre à cette question qui taraude nos
concitoyens.»
D’ailleurs, le groupe Union centriste du Sénat composé de membres de l’UDI mais aussi du Mouvement démocrate a proposé d’instituer, pour les entreprises dont le bénéfice net aurait été en 2021 supérieur de 20% à la moyenne des trois années 2017, 2018 et 2019, une « contribution exceptionnelle de solidarité sur les superprofits » à hauteur de 20%.
En revanche, le ministre allemande des Finances, le libéral centriste Christian Lindner a marqué son opposition à cette taxe:
«Les appels en faveur d'un soi-disant
impôt sur les bénéfices excédentaires sont forts. Alors qu'on entend sans cesse
dire qu'une telle taxe spéciale assurerait la justice sociale, je crains que
cette mesure ne nous fasse plus de mal que de bien.
Les entreprises paient déjà des impôts très élevés ici. L'excès d'impôt sur les
bénéfices ouvre les vannes aux réflexes de politique fiscale. Parce qu'une
industrie est impopulaire, devrait-elle payer des impôts plus élevés ? Cela me
semble arbitraire et ruine la confiance dans notre fiscalité.
Un excès d'impôt sur les bénéfices pourrait nuire à l'Allemagne en tant que
lieu d'innovation. Parce que les profits élevés proviennent souvent de
pionniers qui ont auparavant investi avec des risques élevés pendant des
années. Ce serait dommage s'ils décidaient des quitter l’Allemagne à l'avenir
de peur d'être punis pour leur propre performance.
Des bénéfices élevés dans un domaine (par exemple l'énergie éolienne) sont une
incitation du marché libre à investir davantage dans ce domaine. Cela élargit
les capacités et les offres. En conséquence, à un moment donné, le prix et les
bénéfices chuteront également. Aucune taxe spéciale n'est requise pour cela.
Dans la pratique, il y a beaucoup de problèmes avec les impôts sur les
bénéfices excédentaires. En France, le Sénat vient de voter contre. En Italie,
il y a des problèmes pour percevoir la taxe. Et enfin : il n'y a pas de
compagnies pétrolières basées en Allemagne qui pourraient être taxées plus
lourdement.»
Il rejoint ici la position actuelle du gouvernement centriste français qui, par la voix de Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie, a déclaré son opposition à une taxation des superprofits:
«Je sais bien que dans notre pays, dès qu’une entreprise réussit, le réflexe pavlovien est de dire qu’il faut immédiatement la taxer. Je considère que dans un pays comme la France où le niveau de prélèvements obligatoires est le plus élevé de tous les pays développés, la bonne voie à suivre n’est pas celle de l’augmentation des impôts, des taxes et des prélèvements obligatoires mais leur baisse.»
Et de préciser:
«Je préfère que les entreprises contribuent directement plutôt que de prélever à nouveau une taxe. Dès qu'il y a une difficulté, une taxe. Dès qu'il y a un bon résultat, une taxe. Dès qu'il y a un problème, une taxe. Les entreprises peuvent et doivent contribuer autrement.»
In fine, pour la doxa centristes, la question est compliquée parce qu’elle provoque une collision entre le principe de réalité où cette taxation va à l’encontre de l’efficacité économique et la valeur de la fraternité qui demande que ceux qui profitent le plus du système en soient solidaires dans les moments difficiles comme une crise inflationniste.
Si cette dernière perdure ainsi que les profits énormes dégagés par certaines entreprises, il est probable que le principe de réalité ait du mam à résister à la valeur fraternité.