Or donc l’autocratie russe, après la dictature chinoise, séduit à son tour les dirigeants africains mais aussi, il faut le dire, la population.
Dans une vision binaire, eux , les «gentils» et, nous, Occidentaux, les «méchants», les Africains pensent trouver la solution à leurs problèmes mais aussi à leur incapacité à se prendre en charge dans un rapprochement avec des régimes «forts» qui leur promettent, ici, la prospérité, là, la sécurité alors, qu’en fait, ils sont là pour se constituer une sorte d’empire colonial qui ne dit pas son nom et qui joue sur l’ancien, celui des Occidentaux, qu’ils diabolisent, afin d’être accueillis en sauveur.
Pour la Chine, l’euphorie populaire est largement retombée ainsi que celle d’une partie des dirigeants parce que l’«aide» s’est transformée en une tutelle et une dépendance où le pays asiatique vend ses produits à bas prix qui concurrencent et tuent ceux qui sont produits localement, où les prêts sont devenus des dettes, où les achats de terre arables appauvrissent les Africains et les rendent plus vulnérables à des pénuries alimentaires.
Reste que nombre de gouvernements restent encore fermement dans la sphère d’influence chinoise ainsi qu’une partie de l’élite parce qu’elle est achetée avec des pots de vin ainsi que tout un tas d’avantages.
Pour la Russie, on en est au début de l’inféodation même si l’on a vu comment cela se passait en Centrafrique avec les «mercenaires» – en réalité des soldats officieux du régime de Poutine – du désormais tristement célèbre groupe Wagner.
Le Mali, le Soudan, Madagascar, le Mozambique et, peut-être demain, le Burkina-Faso ainsi que d’autres, font appel aux services de cette bande armée à la violence sans états d’âme qui ne s’embarrasse guère de l’Etat de droit, des droits humains et des Africains eux-mêmes.
Que doit-on penser de la présence de ces deux pays à vocation totalitaire et de la mise en retrait des Occidentaux?
Est-ce la faute de ces derniers ou une nouvelle fois la preuve de l’immaturité d’un certain nombre de régimes africains?
Il y a bien sûr des deux dans ce qui est en train de se passer.
Il est évident que les anciennes puissances coloniales comme la France sont à la fois bienvenues pour financer et aider militairement des pays qui ne parviennent pas à se gérer eux-mêmes, parfois mais pas toujours loin de là, suite à leur ancien statut de colonie.
Il est tout aussi évident que ces mêmes puissances sont souvent détestées pour leurs comportements passés – on le voit avec les manifestations d’une partie de la population quand la situation ne s’améliore pas – et que tout prétendant pour les remplacer est très souvent accueilli les bras ouverts.
On se rappelle que, déjà, du temps de la guerre froide, l’URSS trouvait un terreau favorable à son influence en Afrique pour cette raison et aussi parce que nombre des pays qui devenaient ses vassaux étaient gouvernés par des dictateurs ou des juntes despotiques.
L’influence chinoise et russe en Afrique est évidemment une mauvaise nouvelle en termes géopolitiques pour les Occidentaux et surtout l’Europe.
Cependant, sur le moyen et long terme, elle est également catastrophique pour les pays africains parce qu’ils se replacent dans une situation de colonies sachant que ni les Chinois, ni les Russes ne les «aident» par pure philanthropie et altruisme.
Et ils risquent de payer cher la «générosité» absolument pas désintéressée de leurs nouveaux «amis».
Les Africains et les Européens sont ici dans un jeu perdant-perdant.