Et de déclarer que ces bâtiments n’étaient pas fiables et que l’Australie n’avait pas de compte à rendre à la France qu’elle était venue sauver en 1914 et 1944 (alors que ses troupes étaient sous commandement britannique et se battaient essentiellement pour son ancienne puissance coloniale)!
En somme nous sommes un pays sous-développé qui vendons de mauvais produits et qui devons plutôt la fermer devant une nation qui peut nous faire, et la leçon, et la morale.
Le pire dans ces affirmations mensongères, c’est qu’elles sont reprises complaisamment par une partie de la classe politique – mais, là, on en attendait pas moins de cette opposition en déshérence qui saisit au bond toute attaque fallacieuse qui peut affaiblir Macron même si ça affaiblit également la France de critiquer le gouvernement sans preuve – et une partie des médias et de ces fameux «experts médiatiques» dont on aurait attendu un peu plus de professionnalisme.
Ce plaisir qu’ont ceux-ci de rabaisser constamment la France – qu’elle soit dirigée par la Gauche, le Centre ou la Droite –, sa politique étrangère, sa technologie et, en l’occurrence donc les compétences de ses ingénieurs et autres techniciens qui ont conçu ces sous-marins est affligeante d’autant qu’elle ne se base sur aucune réalité.
Evidemment, nous ne sommes pas obligés de croire Emmanuel Macron quand il nous dit que lors de la dernière rencontre avec le premier ministre australien, celui-ci n’a jamais évoqué une possible rupture du contrat.
Ou Yves Le Drian quand il explique qu’aucun officiel australien n’avait parlé de plus honoré ce dernier.
Mais il y a un communiqué commun entre la France et l’Australie publié le 30 août, soit seulement quinze jours avant la rupture unilatérale du contrat, après une réunion entre les ministres des Affaires étrangères et de la Défense des deux pays qui dit:
«Les deux parties se sont engagées à approfondir la coopération dans le domaine des industries de défense et à améliorer leur capacité de pointe dans la région. Les ministres ont souligné l’importance à cet égard du programme des futurs sous-marins.»
Où étaient les soi-disant mises en garde de l’Australie?
Oui, on s’est bien «foutu de notre gueule»!
Alors, oui, sans doute, sommes-nous une puissance de deuxième catégorie, juste au-dessus de la Grande Bretagne, loin devant l’Australie mais derrière les Etats-Unis, la Chine et la Russie.
Oui, les Australiens ont plus de raisons de toutes sortes de faire allégeance à la puissance américaine et de faire plaisir à leur ancienne puissance coloniale qu’à la France dont ils n’ont jamais été particulièrement proche.
On rappelle, en passant, que le chef de l’Etat australien se nomme Elizabeth II, reine du le Royaume Uni!
Oui, les Etats-Unis veulent enfin se concentrer – avec raison – sur la réelle menace chinoise et ont besoin, dans la région Indo-Pacifique de l’Australie à leurs côtés plus que de la France.
Oui, par ailleurs, les Etats-Unis, dans une rare duplicité à notre égard, nous ont doublés mais s’attaquer à la France comporte pour eux peu de risques à long terme.
Mais, non, ce n’est pas vrai que la France n’a pas été à la hauteur.
Quoi qu’il en soit, et plus fondamentalement, ce «coup dans le dos», selon l’expression utilisée par Jean-Yves Le Drian, repose de manière encore plus prégnante la question de l’indispensable, de l’incontournable, de l’essentielle Europe de la Défense.
Nous devons, nous, Européens, prendre enfin nos responsabilités le plus rapidement possible car, aujourd’hui, nous comptons de moins en moins sur la scène internationale, ce qui veut dire que nous ne sommes plus écoutés et que nos intérêts vitaux dépendent de plus en plus de la décision d’autres pays.
L’«humiliation» de la France dans cette «crise des contrats», c’est aussi l’humiliation de l’Europe.
C’est en notre pouvoir de ne pas l’accepter, maintenant.
Demain il sera trop tard.
Jean-François Borrou & Alexandre Vatimbella