On n’est, bien entendu, guère étonné par cette réaction d’un
personnage qui a érigé le mensonge en mode de gouvernement.
Mais on est abasourdi que les médias français reprennent
cette idée que Trump a quelque part gagné parce qu’il n’y a pas eu de «raz-de-marée
démocrate (que personne ne prévoyait), que le Sénat demeurerait républicain (ce
qui était prévu par les instituts de sondage) et que les gains chez les gouverneurs
des Etats ne sont pas aussi grands qu’espérés par les démocrates.
On a même vu un «chercheur» d’un think tank spécialisé dans
les relations internationales prétendre sur une chaîne du service public que
l’hôte de la Maison blanche avait gagné!
Il faut dire que ce «spécialiste» nous a aussi appris que
Bernie Sanders dirigeait l’aile gauche des démocrates alors que le sénateur du
Vermont (réélu) n’a jamais eu sa carte du parti!
Sur une autre chaîne, privée celle-ci, on a pu entendre un
«avocat international» nous dire que cette victoire des démocrates à la Chambre
des représentants ne changeraient rien puisque Trump pourrait gouverner par
décret alors même que la défaite du Parti démocrate en 2010 dans cette même
chambre (il avait gardé la majorité au Sénat), lors des midterms, avait
complètement bloqué la présidence de Barack Obama…
Et on en passe et des meilleurs.
Plus sérieusement, cette victoire attendue des démocrates
est un ouf! de soulagement pour les défenseurs de la démocratie républicaine et
un répit démocratique en attendant les élections présidentielles de 2020.
Car, oui, les républicains n’ont pas été balayés et Trump
peut se dire que tout n’est pas perdu.
Pour autant, les Américains ont démontré qu’ils n’étaient
pas tombés majoritairement dans le populisme démagogique et le nationalisme
extrémiste naauséabonds.
Rappelons d’ailleurs que Donald Trump – qui avait fait de
ces élections de mi-mandat un référendum sur sa présidence – n’a jamais été
majoritaire dans la pays puisqu’il a gagné la présidentielle avec trois
millions de voix de moins qu’Hillary Clinton et qu’il vient de subir un nouvel
échec.
Que peut-on attendre de cette confrontation entre un
président populiste et républicain et une chambre plutôt située au
centre-gauche et démocrate?
C’est encore difficile à dire parce que l’on ne sait pas ce
que sera le comportement des démocrates.
Vont-ils s’affronter durement avec le président en
s’opposant à toutes ces décisions et en ouvrant des commissions d’enquête sur
toutes les très nombreuses casseroles qu’il traîne avec lui depuis des années
ou vont-ils adopter une position plus modérée pour faire passer des mesures qui
leur permettraient de se présenter en 2020 avec un bilan législatif positif?
Les républicains, eux, en 2008 avaient choisi la première
option et, en 2010, grâce à leur victoire dans la seule Chambre des
représentants (comme les démocrates aujourd’hui), avaient bloqué toutes les
initiatives de Barack Obama.
Cela n’avait pas empêché ce dernier de gagner la
présidentielle de 2012 mais de perdre, dans la foulée, l’entier Congrès
(Chambre des représentants et Sénat) lors des midterms de 2014.
Et, en 2016 – conséquence du blocage républicain de la
deuxième présidence Obama – les démocrates avaient tout perdu, et la présidence,
et le Congrès.
Tout dépendra évidemment du comportement de Trump et de ses
sans doute multiples provocations comme celle de prétendre qu’il a gagné les
élections.
Mais même si l’hydre est toujours là, elle a quand même
manqué son pari d’ancrer profondément ce populisme nationaliste aux Etats-Unis.
Et ce n’est pas seulement une bonne nouvelle pour les
Américains, cela l’est également partout dans le monde où beaucoup de personnages
inquiétants, de Bolsonaro à Salvini, étaient arrivés au pouvoir sur cette vague
«trumpienne» et que les autocrates et leurs sbires ainsi que les populistes
déjà en place, rêvaient d’une planète enfin débarrassée de la démocratie
républicaine libérale.
Ce ne sera pas le cas aujourd’hui.
Rien n’est pour autant gagné dans cette guerre mais, ouf!, avec
cette bataille victorieuse, rien n’est perdu.