Le débat qui s’est tenu l'autre soir à Brooklyn entre Hillary
Clinton et Bernie Sanders, en prélude à la primaire de l’Etat de New York a
permis, avec une clarté sans équivoque, de mettre à jour, si ce n’était déjà
fait, les différences essentielles entre les deux lignes politiques qui
s’affrontent chez les démocrates.
Celle de Clinton, centriste et pragmatiste, qui se focalise
sur ce qui est possible de faire et celle de Sanders, idéologiquement
socialiste et teintée fortement de populisme, qui promet beaucoup et qui parle
de «révolution politique» mais que son héraut est souvent incapable d’expliquer
comment il la mettra en œuvre concrètement.
Jusqu’à présent, cette dernière ligne aurait pu de chance de
l’emporter, voire même de rallier à elle nombre d’électeurs, lors d’une
primaire démocrate, d’autant que Sanders n’est même pas membre du parti.
Mais, aux Etats-Unis comme un peu partout dans le monde, une
partie de l’opinion publique semble être à nouveau prête à écouter les discours
populistes et démagogiques face à un monde qui lui semble de plus en plus
difficile à comprendre et où son statut social dans un futur de moins en moins
décelable, ne semble pas assurée.
Alors, face à cette angoisse mais aussi une impatience, les
populations préfèrent succomber aux sirènes de l’irréalisme et à laisser leur
colère exploser.
Toujours est-il que le face à face de New York a montré
qu’il y avait un réel choix chez les démocrates.
Mais il a aussi montré le vrai visage de Bernie Sanders,
celui que ses soutiens ne veulent pas voir et que les médias ont souvent passé
sous silence, celui d’un idéologue prêt à tout pour gagner, même à travestir la
réalité et à mener des attaques en dessous de la ceinture jusqu’à la
caricature, comme lorsqu’il estime que les victoires de Clinton ont été dans le
«Sud profond», sous-entendu dans des Etats racistes alors même qu’elle y obtient
la quasi-totalité des votes de la communauté afro-américaine...
Comme le dit justement Time magazine, le comportement de
Sanders a beaucoup de points communs avec celui de Trump avec une hargne, une
mise en scène personnelle très autocentrée, l’appui de supporters à la dévotion
quasi-absolue qui n’hésitent pas à répandre de fausses rumeurs sur Hillary
Clinton, soufflée par l’équipe de campagne du sénateur du Vermont.
Pour le New York Times, le socialiste montre également une agressivité
de plus en plus forte alors même qu’il a du mal à expliquer ses positions, par
exemple, sur les armes à feu ou sur l’absence de publication de ses impôts, à
l’inverse des autres candidats.
Dans le même temps, ses proches critiquent les règles de la
primaire démocrate en les traitant de malhonnêtes, comme vient de la faire sa
femme à la télévision, tout en essayant de jouer sur celles-ci en catimini pour
débaucher des délégués qui ont déjà annoncé leur soutien à Hillary Clinton à la
convention de Philadelphie…
Bien entendu, si Bernie Sanders perd la primaire de New York
(ce qui devrait être le cas vu son retard important dans les sondages et la
sociologie de l’électorat démocrate dans l’Etat et, évidemment la ville,
nettement plus favorable à Clinton), il pourra dire adieu à ses rêves
présidentiels, même s’ils sont aujourd’hui très entamés de par l’avance que
possède déjà Hillary Clinton sur lui.
C’est sans doute pourquoi ses attaques sont de plus en plus
virulentes alors même qu’au début des primaires il avait déclaré ne pas vouloir
tomber dans ce type de comportement.
Toujours est-il que le débat de Brooklyn – qui devrait être
le dernier organisé entre leurs deux candidats – a bien mis en lumière
l’existence de deux lignes politiques à l’intérieur du Parti démocrate, celle
du Centre et celle de gauche, «liberal».
Presqu’à chaque fois que les démocrates ont préféré la
dernière ces soixante-dix dernières années, ils ont perdu l’élection
présidentielle.
En revanche, quand ils ont choisi la voie centriste (avec
Obama, Clinton, Carter) ou modérée (avec Johnson, Kennedy et Truman), ils l’ont
emporté.
Alexandre Vatimbella
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