Le prochain sommet des Brics se
tiendra en Russie du 8 au 10 juillet.
Qui se soucie encore de la
réunion de ces cinq pays (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) dont on
disait, il n’y a pas si longtemps qu’ils étaient les futurs grands de la
planète aux côtés des Etats-Unis et de l’Union européenne.
Personne à part la Russie qui s’y
accroche comme à une bouée de sauvetage (et une manière de se venger des
Occidentaux depuis la crise ukrainienne) et peut-être la Chine, seule vraie
grande puissance de ce quintette, qui aimerait toujours en faire un club sous
ses seuls ordres?
Car, aujourd’hui, le Brics, si
jamais il a voulu dire quelque chose, ne représente plus grand-chose.
Déjà, économiquement parlant,
entre une Chine et une Inde qui parviennent à maintenir difficilement – selon
les chiffres qu’elles fournissent que tous les experts considèrent comme peu
fiables – une croissance encore significative et une Russie et un Brésil en
récession – sans parler d’une Afrique du Sud qui fait de plus en plus figure
d’anachronisme dans le club – il n’y pas plus beaucoup de points commun.
Si l’on cherche au niveau
politique et au niveau des relations internationales, c’est encore pire malgré
la façade que tentent de présenter les chefs d’Etat à chacune de leur réunion.
Ainsi, quoi de commun entre une
Chine et une Russie de plus en plus répressives au niveau des libertés de leurs
citoyens et fustigeant sans cesse les «valeurs occidentales», un Brésil
démocratique et aux valeurs occidentales ou même une Inde malgré quelques
poussées d’intolérance dans «la plus grande démocratie du monde»?
Sans parler d’intérêts totalement
divergents en matière international et de mondialisation quand ce n’est pas des
confrontations plus ou moins latentes entre membres du Brics à l’instar de tous
les problèmes qui opposent la Chine à l’Inde, des différends frontaliers à la
bataille entre les produits à bas coûts des deux pays, sur fond d’agressivité
chinoise vis-à-vis de tous les pays d’Asie (sauf la Corée du Nord…) et de
déploiement militaire pour impressionner ceux qui oseraient résister.
Alors, bien sûr, l’agenda du
sommet d’Oufa, capitale de la république russe de Bachkirie est bien rempli
avec, par exemple, la création d’un fonds commun de réserves, la mise sur pied
(enfin?) de la banque d’investissement sensée concurrencer la Banque mondiale
et le FMI (alors même que la Chine vient de créer avec l’appui des Occidentaux
sa propre banque d’investissement…) ou l’établissement d’un front commun contre
l’Occident partout où c’est possible.
Et l’on pari que le communiqué
final sera, comme d’habitude triomphant avec nombre de tâches à finaliser… qui
ne le seront jamais!
Elles ne le seront jamais car
aucun pays, à part la Russie dont son chef, Vladimir Poutine, rêve d’une nouvelle
Union soviétique, ne veut vraiment suivre les autres tant leurs intérêts sont
aux antipodes.
Ainsi, l’Inde a bien plus peur de
la Chine que de n’importe quel autre pays au monde. Le Brésil ne veut
absolument pas tomber sous la coupe des Chinois dont il est déjà si dépendant
pour vendre ses matières premières. La Russie a beau vouloir faire amie-amie
avec la Chine, si la haine des Occidentaux ne réunissaient pas les deux régimes
autocratiques, c’est bien l’une envers l’autre eux qu’ils la partageraient.
Quant à l’Afrique du Sud, elle
voit avec une grande inquiétude la Chine piller les richesses de l’Afrique sans
pour autant participer au développement du continent, provoquant de plus en
plus de réactions violentes des peuples à sa présence.
Mais alors pourquoi le Brics existe
toujours?
Parce qu’il permet à chacun des
pays membres de ce club que l’on aurait du mal à qualifier d’amical de
poursuivre ses propres buts et non, comme l’affirme la propagande gouvernementale
venue essentiellement de Russie et de Chine, parfois d’Inde, de partager des
visions communes qui, si elles existent, ne sont qu’accessoires.
La Chine a besoin d’alliés pour s’établir
comme une superpuissance qui compte; la Russie a besoin d’un club d’«amis» pour
tenter de faire croire qu’elle est encore une superpuissance et qu’elle n’est
pas isolée sur le scène internationale; l’Inde a besoin de cacher tous ses dysfonctionnements
et ses retards impressionnants en matière de développement en étant adoubée par
des puissances dynamiques; le Brésil a besoin du Brics pour s’autoproclamer
première puissance d’Amérique latine face à l’Argentine et afin de se
positionner face aux Etats-Unis sur le contient américain; l’Afrique du Sud a
besoin de ces quatre grands pays pour faire croire qu’elle en est un.
Il est donc fort possible que le Brics
continue à exister encore pendant des années.
Ce qui est moins sûr, c’est que
ce club prenne vraiment des décisions importantes ou qu’il se transforme en une
alliance plus approfondie entre des pays qui craignent sans doute encore plus
ce cas de figure que son délitement…
Et ce dernier est sans doute son
avenir le plus probable.
Alexandre Vatimbella
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