Quand les dictateurs et les dirigeants
autoritaires sont aux aboies, ils ont tendance à s’unir face à aux démocraties
et à sortir leurs anathèmes et à montrer leurs muscles.
Telles sont, à nouveau, les
postures de la Chine et de la Russie qui, avec Xi Jinping et Vladimir Poutine
et comme au bon vieux temps de la Guerre froide, se serrent les coudes face à l’Occident
et aux revendications démocratiques de leurs propres peuples, elles qui sont
déjà des partenaires dans le club moribond des grands émergents, le Brics
(Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).
Mais voilà bien une alliance
contre-nature qui doit faire bondir tous les observateurs avertis des deux
pays.
Car la grande peur ancestrale de
la Russie, ce n’est pas l’Occident ou même la perte de sa sphère d’influence à
l’Ouest, mais bien la Chine, son milliard et demi d’habitants (alors que la
population russe n’en finit pas de baisser), ses revendications territoriales
ancestrales à sa frontière extrême-orientale ainsi que sa nouvelle puissance
économico-politico-militaire.
Et la Chine se méfie de cette
Russie expansionniste qui a asservi tous ces peuples dans feue l’Union
soviétique que Vladimir Poutine veut faire revivre d’une manière ou d’une
autre.
Dès lors, voir les deux pays
faire des déclarations communes face à l’Occident rappelle que Staline et Mao,
déjà, maniaient la rhétorique antidémocratique tout en se méfiant l’un de
l’autre au plus haut point.
C’est tellement ahurissant de
voir la Chine se taire sur les agissements de la Russie en Ukraine, elle qui
est terrorisée que la communauté internationale se mobilise sur l’indépendance
du Tibet ou du Xinjiang et qui brandit la non-ingérence dans les affaires
intérieures d’un pays comme une règle intangible et absolue.
Bien évidemment les apprentis
dictateurs comme Poutine ou Xi ne sont pas à une contradiction près quand il
s’agit de se battre contre leur ennemi mortel, la liberté.
On voit bien la similitude dans
le combat contre ceux qui demandent un régime démocratique réel que ce soit en
Russie et en Chine.
Non pas ceux qui nous rabâchent les
«spécificités» de chacun des deux pays pour affirmer qu’il faut une «démocratie
à la chinoise» ou «une démocratie à la russe» dont le point commun serait de
nier les droits de l’individu et les valeurs de la personne au nom d’une vision
holistique soi-disant «historique».
Heureusement que les dissidents
qui peuvent parler avant d’être envoyés dans les camps chinois et russes ou
après en être sortis, affirment l’inanité d’une telle vision réductrice et rappellent
que la demande d’une vraie démocratie est réelle et forte, tant en Chine qu’en
Russie.
Oui, Vladimir Poutine joue à l’apprenti-sorcier
en s’alliant avec la Chine qui lorgne sur les matières premières dont la Russie
regorge.
Car ce n’est pas les richesses et
le territoire des Etats-Unis, de la France ou de l’Allemagne que lorgnent les
dirigeants de Pékin mais bien celui d’une Russie en décadence.
Tous les mauvais choix que le
maître du Kremlin fait aujourd’hui, son pays devra en payer le prix demain au
centuple.
Quant à la Chine, elle trouve
dans Poutine un allié de circonstance dont elle pourra se débarrasser le moment
venu, peut-être même pour se rapprocher de l’Occident quand il le faudra.
Néanmoins, cette alliance risque
de développer un peu plus son hubris et lui faire faire quelques mauvais
calculs qu’elle pourrait payer au prix fort.
Quand à l’Europe et aux
Etats-Unis, ils doivent prendre cette alliance à la fois au sérieux – les régimes
autocratiques font souvent des choix illogiques voire insensés – et pour ce qu’elle
est dans la durée, de la poudre de perlimpinpin.
Alexandre Vatimbella
© 2014 LesNouveauxMondes.org