Faut-il
ou non intervenir en Syrie? Comment se comporter face à l’autocrate Poutine et
au régime communiste chinois? Quelle est la meilleure façon de protéger la
liberté?
Autant
de questions qui se sont entrechoquées ces derniers mois que ce soit avec les
combats en Syrie, les affrontements en Egypte, les fuites sur les pratiques de
la NSA aux Etats-Unis, les provocations russes contre les gays et le soutien du
régime aux dictateurs de tous poils sur fond de reprise en main intérieure, le
tour de vis chinois depuis l’arrivée de Xi Jinping qui se réfère à Marx et,
surtout, à Mao en lui rendant des hommages appuyés et répétés, souhaitant marcher
dans ses pas.
Les
démocraties sont donc, une fois de plus, devant des dilemmes importants.
Le
président syrien, comme son père avant lui, tue ses concitoyens avec du gaz
sarin, les Frères musulmans et l’armée égyptienne rivalisent d’intolérance, les
écoutes américaines mettent en émoi une partie du monde qui place la liberté
au-dessus de la sécurité, les agissements du président russe nous rappelle tous
les jours qu’il a été formé par le KGB dont on pouvait comparer les pratiques
lors de la guerre froide à la tristement célèbre Gestapo et les sombres
prédictions des défenseurs chinois de la démocratie sur la personne du nouveau
maître de l’Empire du milieu se révèlent malheureusement trop vraies.
Que
faire?
Se
faire tuer pour sauver des enfants syriens? Laisser une dictature quelle
qu’elle soit se mettre en place en Egypte? Accepter de perdre de la liberté
pour de la sécurité sans être sûr que le deal est exactement celui-là?
Continuer à faire comme si Poutine et Xi étaient des gens charmants et
fréquentables pendant que leurs opposants soient pourchassés et emprisonnés?
Les
réponses ne sont pas simples et, surtout, ne doivent pas être simplistes.
Prenons
l’exemple syrien. Se lancer dans une guerre totale avec le clan Assad tête
baissée serait aussi stupide que de ne rien dire et faire en se lavant les
mains de massacres horribles et inacceptables.
Pourquoi?
Parce
que, dans le premier cas, intervenir alors que la chute d’Assad aurait de grandes chances de
permettre aux intégristes islamistes de mettre le pays sous leur coupe et à en
faire une base de l’extrémisme et du terrorisme, faisant en quelque sorte d’avoir
sauver les enfants syriens pour que nos enfants soient éventuellement tuer dans
de futurs attentats.
Et,
dans le deuxième cas, il est impossible pour toute communauté ayant une
conscience de fermer les yeux en prétendant qu’un dictateur a le droit de tuer
son peuple, notamment ses enfants, sans vergogne, sans devoir rendre des
comptes mais aussi sans porter un coup à l’image de la démocratie, incapable de
réagir face à des comportements qui la provoquent dans son essence même.
Ce
dilemme est celui de Barack Obama aujourd’hui. Mais il est celui de toute la
communauté internationale, en tout cas de celle qui revendique des valeurs
humanistes.
Même
cas de figure ou presque en Egypte où il faut se demander si une organisation,
les Frères musulmans, qui s’est battue pendant des décennies contre les valeurs
démocratiques et ne les a endossées que parce qu’elle a gagné les élections –
et dont la pratique démocratique a laissé à désirer pendant son passage au
pouvoir – vaut mieux qu’une armée qui n’a guère prouvé son attachement à ces
mêmes valeurs.
Quant
à savoir si nous devons adresser la parole à Poutine et à Xi, la realpolitik
répond oui à coup sûr. Mais cela ne doit pas nous empêcher de dire ce que nous
pensons de leurs agissements et de tenter toutes les pressions pour les mettre
en échec? A voir certains responsables politiques occidentaux faire allégeance
à ces deux hommes et à leurs régimes donnent parfois des nausées.
Comme
le montre crûment les révélations d’Edward Snowden sur les pratiques de l’agence
de renseignements américaine, la NSA, l’éminente question de savoir où se situe
le curseur entre défense de la démocratie, défense des démocraties et intérêt
des démocraties n’a pas de solution évidente.
Pour
autant, les précédents devraient inciter à ne pas baisser la garde.
Ainsi,
elle s’est déjà posée lors de la montée en puissance du fascisme et du nazisme
entre les deux guerres mondiales puis lors de la guerre froide avec le bloc
soviétique avec les résultats que l’on sait.
Le
renoncement face à l’Allemagne nous a plongés dans une guerre à 50 millions de
morts alors que l’on aurait pu agir contre Hitler quand il en était encore
temps.
L’affrontement
avec les Russes s’est révélé problématique jusqu’à l’implosion de l’URSS,
exsangue par ses dépenses militaires démesurées et incapable d’apporter le
bien-être à sa population.
Avec,
à la clé, des camps de concentration dans les deux pays.
Le
régime en place à Moscou – comme à Pékin d’ailleurs – est encore largement
dominé par une idéologie qui diabolise la liberté qualifiée d’«occidentale».
Xi
Jinping, le nouveau maître du Parti communiste chinois ne parle que de maoïsme,
de renforcement de l’armée et des valeurs occidentales erronées et dangereuses
mettant en avant un «rêve chinois» qui risque de devenir le cauchemar des
démocraties.
Le
ralentissement préoccupant de la croissance chinoise sur fond de corruption, de
pollution catastrophique et de menaces de toutes sortes sur le régime va sans
aucun doute renforcer, au moins dans un premier temps, les tendances
autoritaires de celui-ci.
Les
prisons sont à nouveau pleines d’opposants, internet est de plus en plus
contrôlé et censuré, le peuple est invité à se faire moins critique et à suivre
la ligne officielle.
Tout
ceci nous amène à cette vérité basique, pure et dure: la démocratie a été, est
et restera à jamais un combat quotidien contre des forces qui, de tous les
côtés ainsi que de l’intérieur même, travaillent à la rogner, à la dénaturer et,
in fine à l’abattre.
La
démocratie américaine est née d’une guerre de libération. Ce sont des
révolutions qui ont accouché des valeurs démocratiques françaises. Même le
système démocratique britannique a nécessité après la Grande Charte de 1215,
une lutte au cours des siècles pour s’établir.
Ceux
qui renoncent à vouloir mener ce combat condamnent la démocratie, d’abord à s’affaiblir
puis à disparaître.
Ils
font le jeu des ennemis des valeurs et des principes démocratiques.
Peut-être
que les peuples qui goûtent à un régime démocratique, certes imparfait mais
envié par tous ceux qui en sont privés, ne veulent pas ou plus se battre pour
le protéger et le faire exister.
Peut-être
qu’ils préfèrent leur sécurité ou tout simplement leur confort quotidien à leur
liberté.
Peut-être
qu’ils préfèreraient vivre esclaves que mourir libres.
Les
sondages, généralement, disent le contraire.
Alors,
mettons nos actes en accord avec nos paroles: défendons la démocratie avant qu’on
nous défende de le faire.
Alexandre
Vatimbella
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