Il y a beaucoup de vrai et de nombreux éclairages perspicaces dans le livre que Yannick Mireur consacre au monde d’Obama, à la fois, le monde intérieur des Etats-Unis et le monde extérieur de la première puissance mondiale.
Le fondateur de feue Politique américaine, une revue consacrée entièrement aux Etats-Unis sait de quoi il parle, ce qui est assez rare chez les «spécialistes» autoproclamés de l’Amérique et de tous ceux qui affirment savoir qui est Barack Obama sans jamais avoir appris à le connaître.
Il est donc réconfortant de noter que Yannick Mireur a bien vu les filiations évidentes entre le «Change we believe in» et le «Yes we can» d’Obama et les Square Deal de Theodore Roosevelt, le New Deal de Franklin Roosevelt et la Great Society de Lyndon Johnson.
Car Barack Obama n’est pas celui qui vient de nulle part en révolutionnant la politique américaine. Yannick Mireur a raison de dire qu’il n’est pas, non plus «l’homme de la rupture». Il s’inscrit dans cette tradition centriste chère à Abraham Lincoln, Theodore Roosevelt et Bill Clinton pour citer trois de ses glorieux prédécesseurs (si, si Clinton en est un!).
Un centrisme fait d’actions et de volonté bipartisane par le dépassement des intérêts sectoriels en vue de bâtir une société où la sphère publique intervient là où l’initiative privée a failli sans en faire un dogme. Le tout, évidemment, afin d’assurer le bien-être de la population, entretenir l’idée de la poursuite du bonheur inscrite dans la sacro-sainte Constitution et revitaliser le rêve américain (même si celui-ci semble avoir concrètement sombré à la fin des années cinquante comme le montrent les statistiques, il demeure un symbole pour les Américains et l’on sait tous ce que le symbolique peut soulever comme montagnes…).
L’auteur écrit avec raison qu’Obama «rejette les absolus et les dogmes, les schémas préconçus, leur préférant l’échange, la confrontation des idées, la compréhension du mode de pensée de ses opposants, considérant comme aussi légitime que la sienne leur américanité, malgré leur expérience distincte». Et de poursuivre: «ainsi la recherche du consensus, de l’élévation du débat dans l’intérêt collectif plus qu’une confrontation partisane prévisible, guide son action».
Bien sûr, la présidence du premier président noir n’en est qu’à un peu plus de la moitié de son premier mandat. Il est donc difficile de savoir ce qu’il adviendra au cours de celle-ci – et d’en faire, a fortiori un bilan exhaustif - surtout si Obama, comme les sondages le montrent actuellement, devrait être réélu. A moins que le chômage endémique actuel ne s’améliore pas et conduise à un rejet de sa personne par les Américains et à sa défaite en 2012. Encore faudrait-il qu’il y ait, en face, un candidat républicain crédible, ce qui n’est pas encore le cas.
Cet ouvrage est aussi utile pour tous ceux qui souhaitent lire une réflexion de qualité sur les relations entre les Etats-Unis et la Chine, Yannick Mineur étant fin connaisseur des deux empires de ce début du XXI° siècle. Mais c’est tout aussi le cas pour les relations entre l’Amérique et l’Inde, le Japon, la Corée ou l’Europe.
En revanche, la thèse défendue sur les relations entre l’Amérique de Barack Obama et le Moyen Orient (pays arabes et Israël) est plus idéologique qu’explicative, malheureusement. Pour autant, cela ne doit pas être une raison de ne pas lire cet ouvrage.
Alexandre Vatimbella
© 2011 LesNouveauxMondes.org