Face aux multiples appels à refuser la mondialisation, surtout dans le monde politique français, le directeur de l’OMC a réagi devant ces tentatives de repliement sur soi.
Dans un entretien avec le journaliste Alain Faujas et paru dans quotidien français Le Monde d’aujourd’hui, Pascal Lamy, le directeur de l’OMC (Organisation mondiale du commerce) estime que refuser la mondialisation n’est pas la bonne attitude. Extraits.
Etes-vous étonné du retour du débat sur les bienfaits du protectionnisme et de la démondialisation?
(…) Dès 1999, au Parlement européen, j'avais dit que la mondialisation avait ses bons et ses mauvais côtés, et qu'elle devait être «maîtrisée». Je n'étais pas et ne suis pas devenu un apôtre de la «mondialisation heureuse». Les turbulences qu'elle engendre sont vécues d'autant plus dans l'angoisse qu'elles frappent des pays qui se trouvaient en tête du classement de la richesse mondiale. Mais la démondialisation est une mauvaise réponse à cette bonne question. C'est un concept réactionnaire.
Pourquoi?
Parce que le phénomène est parti pour durer. Les moteurs de la mondialisation sont technologiques: le porte-conteneurs et Internet. Gageons que la technologie ne reviendra pas en arrière! Vouloir démondialiser, c'est jeter le bébé avec l'eau du bain. Et même si c'était souhaitable, ce ne serait plus possible. On n'est plus au temps où le tsar et le roi de France passaient des accords de commerce entre eux. Aujourd'hui, les frontières entre le commerce international et le commerce domestique s'effacent. Les chaînes de production se sont globalisées pour gagner en efficacité. Cela signifie que freiner vos importations revient à pénaliser vos exportations. Sans compter la riposte de partenaires qui ne sont pas naïfs.
Beaucoup en France font comme si l'économie nationale était asservie aux pays émergents, et surtout à la Chine, en raison de leur dumping environnemental et social. Les chiffres ne disent pas cela: les deux tiers du commerce français sont réalisés avec l'Union européenne. C'est en Europe que les parts de marché françaises diminuent, et c'est dans le reste du monde qu'elles progressent.
Reste l'angoisse des bouleversements de la mondialisation…
(…) Ce n'est pas la mondialisation qui fait problème, mais l'insuffisance de garde-fous, de régulations.
Jean-Louis Pommery
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