Selon un rapport de l’Institut Montaigne, si l’économie est le premier ressort du développement des relations entre les pays du Bric et l’Afrique, les manières de procéder divergent.
Dans un rapport sur les relations entre la France et l’Afrique intitulé «Réinventer le co-développement», l’Institut Montaigne passe en revue les politiques chinoise, indienne et brésilienne sur le continent noir. Selon les auteurs de l’étude, «la Chine est en train de changer la donne sur le continent africain». De même, ils estiment que «la Chine est souvent perçue comme ayant une attitude extrêmement prédatrice vis-à-vis de l’Afrique. Ce constat peut être aujourd’hui nuancé: la Chine s’est rendu compte qu’un soutien trop affiché à certains chefs d’Etat pouvait lui causer un tort considérable». Ainsi, au crédit de la Chine, il ne faut pas oublier que «l’investissement de Pékin sur le continent noir s’inscrit dans une logique de longue duré», mais, de plus, «contrairement aux idées reçues, la Chine investit aussi largement dans l’aide au développement à l’Afrique» avec une politique «de soutien volontariste».
Les échanges commerciaux entre la Chine et l’Afrique «ont été multipliés par dix depuis 2001 et représentait 100 milliards de dollars en 2008». En outre, selon l’ancien Commissaire européen au développement, Louis Michel, «l’effet Chine» compterait pour 2% de hausse du PIB africain chaque année. Néanmoins, les auteurs écrivent qu’il «ne faut pas surévaluer la place de la Chine en Afrique. En effet, elle demeure marginale en stock de capital sur le continent puisqu’elle représente moins de 1% des investissements directs étrangers et 8,5% des échanges de l’Afrique avec le reste du monde».
Concernant l’Inde, la stratégie de ses investisseurs en Afrique «est souvent considérée comme plus durable et moins prédatrice que celle de la Chine». Et «à la différence de la Chine, l’Inde mise sur le dynamisme de son secteur privé» pour être présente sur le continent noir. De plus, elle «fournit des modèles de développement qui ont valeur de normes nouvelles pour les Africains: révolution verte réussie, régulation forte de l’investissement étranger et du secteur financier, succès d’une économie tertiaire exportatrice de services et de biens culturels…».
Pour ce qui est du Brésil, l’Institut Montaigne note que «la solidarité Sud-Sud est présentée comme un axe majeur de la diplomatie du président Lula». Un président brésilien qui n’a pas hésité à visiter vingt pays africains en sept ans et à ouvrir dix-huit ambassades en deux ans sur le continent! Un intérêt qui est aussi altruiste selon les auteurs du rapport qui estiment que «le Brésil a mené de véritables efforts de coopération directement bénéfiques aux populations africaines». Et «cette sollicitude pour le continent africain permet à Brasilia de se poser en acteur politique international responsable».
Cependant, il ne faut pas être dupe: «l’intérêt du Brésil pour l’Afrique s’inscrit, tout comme celui de la Chine et de l’Inde, dans une logique économique». En cela, les grands pays émergents rejoignent les Etats-Unis, la Russie et l’Europe. Mais, à l’inverse des deux premiers qui venaient régler leurs problèmes de grande puissance du temps de la guerre froide et de la dernière qui était venue coloniser le continent, ils gardent une certaine virginité géostratégique. En tout cas jusque récemment. Jusqu’à ce que certaines populations africaines se sentent encore plus humiliées et exploitées par les Chinois qu’elles ne l’avaient été par les Européens du temps de la colonisation. Comme quoi l’Afrique ne semble malheureusement pas encore avoir trouvé les partenaires idéaux pour mettre en place une relation «gagnant-gagnant» qui la sortirait définitivement de son sous-développement…
Alexandre Vatimbella
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