Pour le Parti du congrès qui vient de remporter les élections et le nouveau gouvernement de Manmohan Singh, les difficultés vont commencer tant les attentes en Inde sont fortes et souvent contradictoires.
Après les résultats des élections législatives qui ont donné une victoire nette au Parti du congrès et à sa coalition, le patronat indien est immédiatement monté au créneau pour affirmer que, désormais, plus rien ne s’opposait à une libéralisation plus grande de l’économie du pays d’autant que le Parti du congrès n’avait plus besoin des communistes pour former une majorité au Parlement. Or, comme le constate Christophe Jaffrelot, spécialiste de l’inde au CERI (Centre de recherche en relations internationales de Sciences Po), «il y a une pression sur le gouvernement de la part du patronat qui va demander des réformes, de la libéralisation alors que dans les campagnes on n’en veut pas et l’on a voté pour le Congrès à cause de ses programmes sociaux. Si le Congrès va dans le sens de la libéralisation de l’économie voulue par la patronat, il va s’exposer à des risques de troubles sociaux».
D’autant que la victoire du Parti du congrès peut prêter à différentes explications. Sa position centriste a joué en sa faveur, notamment en matière de sécurité, mais aussi en matière économique où il a su préserver une économie fermée et à sur de nombreux points archaïques avec une ouverture vers la globalisation qui a permis l’émergence, par exemple, d’un secteur informatique de pointe, notamment dans les sociétés de services informatiques. Mais, pour Christophe Jaffrelot, la victoire du Congrès alors même que le pays est touché par la crise économique et financière mondiale plus fortement qu’on le pensait de prime abord vient essentiellement de l’inflation: «le problème numéro un en Inde, c’est l’inflation. Les électeurs ont voté pour le Congrès parce qu’avec la crise l’inflation est proche de zéro. Dans toutes les élections passées, les partis au pouvoir les ont perdues à chaque fois que l’inflation était importante. Car, dans les campagnes, la baisse de la croissance ne signifie rien de très concret alors que l’inflation, oui».
Ce qu’il faudra regarder dans les prochains mois c’est de quel côté va pencher le Parti du congrès qui, aujourd’hui, en tant que formation centriste, possède une aile «libérale» représentée par le Premier ministre reconduit Manmohan Singh et une aile «social-démocrate» représentée par la présidente du parti, Sonia Gandhi. Reste que les problèmes auxquels va devoir face le nouveau gouvernement sont gigantesques d’autant que de nombreux économistes indiens estiment que la croissance du pays n’a guère bénéficié jusqu’à présent à l’énorme majorité de la population et que les déficiences du pays en matière d’infrastructures vont se faire de plus en plus sentir dans la capacité du pays à booster sa croissance. Après la bonne nouvelle des élections, va-t-il y avoir une déception à la mesure de l’espérance qui a vu le jour?
Alexandre Vatimbella
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