Selon une enquête de Booz & Company, les entreprises mondiales implantées en Chine estiment que celle-ci demeure un marché et une plateforme de production stratégiques pour l’avenir.
Le cabinet de conseils en stratégie Booz & Company a rendu public récemment sa deuxième enquête sur la présence des multinationales en Chine intitulé «China manfufacturing competitiveness 2008-2009 » et réalisé avec le concours de la Chambre de commerce américaine en Chine. Elle a été conduite à l’automne et l’hiver 2008 lorsque la Chine a commencé à être réellement touchée par la crise économique et financière mondiale. Basés sur un panel de 108 entreprises étrangères établies en Chine, ses résultats montrent que «les grandes entreprises industrielles multinationales perçoivent l’évolution de la Chine, à la fois comme marché intérieur et plateforme pour l’exportation». En outre, «de plus en plus d’entreprises projettent d’y développer leurs activités alors qu’un nombre moins élevé qu’en 2007 exprime sa volonté de relocaliser la production dans des pays à moindre coût tels que l’Inde ou le Vietnam». Ceci devrait mettre du baume au cœur des dirigeants chinois qui craignent que l’élévation des coûts de production dans leur pays (notamment à cause de salaires plus élevés) n’incite les multinationales à s’en aller vers des pays plus intéressants en la matière.
Voici les principaux résultats de cette enquête :
- Près d’une entreprise sur deux a subi une baisse annuelle de ses exportations de plus de 10 % au quatrième trimestre 2008. Environ 13 % des entreprises sondées mentionnent une chute de leurs exportations comprise en 30 et 49 % par rapport à l’an dernier. Quant aux ventes réalisées sur le marché chinois, le bilan n’est guère plus encourageant. Pour plus de 40 % des entreprises interrogées, les ventes sur le marché intérieur chinois ont enregistré une chute supérieure à 10 %. Confrontées à ce contexte difficile et à l’absence de signes permettant d’espérer une reprise rapide, un tiers des entreprises déclare envisager une renégociation des prix d’achat auprès de leurs fournisseurs chinois de matières premières et pièces de fabrication, afin de générer des gains de coût supérieurs à 10 %. Cela se traduit par la fermeture d’un grand nombre d’usines chinoises et des millions de travailleurs, migrants pour une grande partie d’entre eux, perdent aujourd’hui leurs emplois ou ne trouvent plus d’opportunités d’embauche dans le secteur industriel.
- En dépit de la récession économique, « faire du business » en Chine coûte plus cher. Pour la deuxième année consécutive, les entreprises sondées font état d’une hausse significative des coûts de production (+15 % cette année contre +10 % l’an dernier). Une grande partie de cette augmentation est due aux hausses de salaires de la main d’œuvre chinoise (« cols blancs » et « cols bleus ») ainsi qu’à l’augmentation du prix des matières premières.
- L’optimisation de la production par la mise en place de «systèmes lean» et «d’optimisation des flux de production» constitue une réponse à l’augmentation des coûts. 39 % des sociétés interrogées, contre 27 % en 2007, ont en effet adopté des dispositifs d’optimisation de la production et considèrent cette approche comme un moyen d’améliorer leur efficacité et de générer des économies d’échelle. Les marges bénéficiaires brutes des multinationales qui adoptent de telles pratiques sont, en moyenne, supérieures de 4 % par rapport aux entreprises qui n’ont pas adopté ce genre de mesures.
- Les entreprises qui sont parvenues à équilibrer leurs structures de coût renforcent, en dépit de la récession mondiale, leur implantation en Chine. Sur l’ensemble des entreprises sondées qui estiment bien maîtriser leurs coûts, 53 % affirment avoir des projets de développement de leurs capacités de production, 29 % envisagent d’ouvrir de nouveaux sites de production et 44 % réfléchissent à investir dans la modernisation de leurs procédés de fabrication. Cet attachement à la maîtrise des coûts s’avère très profitable: 27% des entreprises qui estiment bien maîtriser leurs coûts ont en effet enregistré une augmentation annuelle de leurs ventes sur le marché intérieur chinois au cours du quatrième trimestre, contre seulement 18 % pour les entreprises qui connaissent des problèmes en matière de contrôle des coûts.
- Les multinationales les plus rentables sont celles qui ont su tirer parti de la « dualité Chinoise », en adoptant une double stratégie de vente et de «sourcing». Elles devancent généralement les entreprises qui se contentent de profiter d’une main d'œuvre à moindre coût pour fabriquer des biens de consommation bon marché destinés aux marchés occidentaux, ou d'importer des produits uniquement destinés à un marché intérieur chinois en pleine croissance. L’enquête révèle que le concept de « dualité chinoise » continue à gagner de l’importance: 57% des entreprises interrogées considèrent cette approche comme leur moteur premier pour se développer en Chine, contre 47% l’année précédente. Dans le même temps, la part des entreprises interrogées qui citent le coût de la main d’œuvre et des matières premières comme raison principale de leur présence en Chine sans mentionner l’accès au marché domestique a diminué de 50%, passant de 22 à 11%.
Alexandre Vatimbella
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