Invité pour ouvrir le désormais traditionnel Forum économique de Davos, le premier ministre chinois a avoué que la Chine était frappée par la crise et il a réclamé dans la foulée une refonte du système économique de la planète.
La Chine n’en démord pas : même si elle est touchée par la crise économique et financière mondiale, elle aura une croissance de 8% en 2009. Ce chiffre (un porte-bonheur dans la culture chinoise) qui lui permettrait d’amortir les effets de la crise, laisse pourtant sceptiques la plupart des observateurs mais aussi les organismes internationaux qui, tel le FMI, prévoient une croissance bien en-dessous, aux alentours de 7% (6,7% pour les dernières prévisions du Fonds monétaire international).
En tout cas, ces 8% ont encore été au cœur de l’intervention de Wen Jiabao lors de son discours d’ouverture du Forum économique mondial de Davos en Suisse. Car ces 8% permettent en plus au gouvernement chinois, en tant que bon élève de la classe, de se tresser quelques couronnes d’autosatisfaction sur sa capacité à être «responsable», de demander un «nouvel ordre économique mondial» avec plus de régulation, de fustiger les pays irresponsables qui ont vécu «au-dessus de leurs moyens» et de demander aux pays riches de mettre la main au portefeuille…
Cette leçon de morale économique de la part d’un gouvernement qui manipule sa monnaie, qui a contribué à permettre aux « irresponsables » (sous-entendu les Etats-Unis) de vivre à crédit et au-dessus de leurs moyens, dont des milliers d’usines (dont beaucoup ont vendu des produits de mauvaise qualité voire dangereux) ont récemment fermé faisant des millions de chômeurs en plus et qui n’a pas assez investi dans le développement de son marché intérieur est, à la fois, comme toutes les leçons de ce genre d’où qu’elles viennent, présomptueuse et dérisoire. De même que l’affirmation par Wen Jiabao que le salut de l’économie mondiale pourrait venir de la Chine. Pour cela, il faudrait qu’elle ouvre totalement son marché aux importations et qu’elle arrête de subventionner largement ses exportations, ce qui n’est pas dans ses intentions, loin de là.
Evidemment, il est compréhensible que le Premier ministre chinois soit venu délivrer un discours rassurant sur la situation de son pays à destination d’interlocuteurs étrangers mais aussi de son peuple au moment où une crise sans précédent frappe l’économie mondiale. Et l’on voudrait croire que la Chine pourrait être le moteur d’une croissance retrouvée grâce à sa «solidité» vantée par Wen Jiabao à Davos qui n’a pas hésité à ajouter que «La Chine reste sur les rails d'un développement régulier et rapide». Mais, malheureusement, il ne s’agit pas simplement de croire mais de constater que la situation de la Chine s’est dégradée très rapidement depuis trois mois. Au mois d’octobre, ce discours avait encore une légitimité qu’il a perdue depuis. Reste que l’incertitude dans laquelle se trouve l’économie mondiale peut aussi apporter de bonnes nouvelles. Mais peu d’experts osent parier sur une telle éventualité…
Alexandre Vatimbella
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