Selon l’économiste de l’IFRI et spécialiste de la Chine, Françoise Nicolas, le pays n’a pas craindre une crise financière mais bien un ralentissement de son économie.
Dans le dernier numéro de la Lettre du Centre Asie de l’IFRI (Institut français des relations internationales), l’économiste Françoise Nicolas estime que la Chine ne devrait pas être atteinte par la crise financière qui touche principalement les pays développés mais, qu’en revanche, elle n’évitera pas un ralentissement de son économie.
L’économiste revient d’abord sur l’idée de « découplage » longtemps à la mode chez les spécialistes des pays émergents : « Certains se plaisaient à croire que l’Asie pourrait échapper à la contagion de la crise financière américaine et assurer le relais des Etats-Unis comme principal moteur de la croissance mondiale. Les tenants de la thèse du « découplage » étaient de ceux-là. Or, il ne fait plus de doute aujourd’hui qu’aucune des économies d’Asie orientale ne sera épargnée par les turbulences financières. » Cependant, elle estime que « les difficultés qu’elles rencontreront devraient être d’une tout autre nature qu’en Occident ». De manière optimiste pour les pays d’Asie, elle pense que « la crise actuelle pourrait marquer l’ouverture d’une ère nouvelle où les rapports de force économiques mondiaux seraient plus favorables au continent asiatique ».
Quant à la Chine, le pays « devrait parvenir à éviter la propagation de la crise financière ». Et d’avancer plusieurs arguments : « le caractère encore relativement fermé du système financier chinois, (…) la relative bonne santé du système bancaire chinois, (…) le degré d’exposition des banques chinoises aux subprimes américaines est limité, bloquant ainsi le principal canal de contagion ». De même, selon elle, « la Chine semble également à l’abri d’une crise immobilière en raison des caractéristiques de son marché immobilier. L’Etat reste propriétaire de la terre, les propriétaires n’en obtenant l’usage que pour une période limitée de 70 ans. Dans ces conditions l’Etat a tout intérêt à éviter un effondrement des prix qui le priverait d’une source conséquente de revenus lors des opérations périodiques de ventes. »
En revanche, Françoise Nicolas estime que « le ralentissement de l’activité économique dans les grandes économies occidentales (Etats-Unis mais aussi Union européenne) ne saurait épargner la Chine tant son degré de dépendance vis-à-vis des marchés occidentaux demeure élevé ». Car, « l’hypothèse de découplage entre l’économie chinoise et l’Occident, aussi attrayante soit-elle, n’est malheureusement pour l’heure que chimère ». Certains estiment que ce ralentissement pourrait être une bonne nouvelle pour la Chine qui souhaitait éviter la surchauffe de son économie d’autant qu’elle marquerait également une montée de la demande intérieure qui lui assurerait ainsi des fondamentaux économiques plus sains. Mais Françoise Nicolas met en garde : « l’ampleur du ralentissement induit sera fondamentale. Si le taux de croissance devait passer au dessous des 8%, les risques d’instabilité sociale augmenteraient, ce que reconnaît d’ailleurs un think-tank gouvernemental. Dans ces conditions, la crise économique pourrait se muer en crise sociale, voire en crise politique ». Reste que pour elle, ce scénario n’est pas le plus probable.
Alexandre Vatimbella
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