Ubifrance et le CEPII ont organisé un colloque le 3 avril sur les conséquences de la crise financière dans les pays asiatiques. L’Inde et la Chine, les deux «grands pays émergents» devraient subir des dommages collatéraux sans pour autant voir leurs économies en grand danger. A moins que la récession américaine ne dure plus longtemps que prévu. Alors, tout sera possible… Ubifrance (Agence française pour le développement international) et le CEPII (Centre d’études prospectives et d’informations internationales) ont organisé, le 3 avril, un colloque pour faire le point sur les conséquences en Asie de la crise américaine des subprimes qui débouche de plus en plus sur une crise financière internationale touchant le système bancaire.
Selon les prévisions du CEPII mais aussi de la COFACE (Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur) ou du FMI (Fond monétaire international), la crise économique due à la crise des subprimes américaines devraient avoir un impact, certes limité, mais un impact quand même sur les économies chinoises et indiennes qui devraient perdre environ un point de croissance en 2008 par rapport aux estimations réalisée avant que l’ampleur de la crise ne soit constatée. Et cela est valable pour l’ensemble de l’Aise. Car, pour Agnès Belaïsh, économiste au FMI, «même s’il y a très peu de risques ‘subprimes’ en Asie, nous ne voyons pas de découplage entre l’Asie et le reste du monde». Cette idée de découplage est avancée par un certain nombre d’experts asiatiques qui estiment que leurs pays ont la capacité, notamment au niveau des investissements, d’éviter les ondes de choc de la crise. Selon Agnès Bénassy-Quéré du CEPII, «il y a deux façons de voir le couplage Asie/Occident au niveau économique et financier. La première est la vision par le haut qui dit que, nécessairement, il y a couplage entre les deux entités et que les problèmes de l’Occident vont rejaillir sur l’Asie notamment à cause des exportations de cette dernière. Et puis, il y a une vision par le bas qui est celle de beaucoup d’Asiatiques qui affirment qu’il y a une forte épargne dans les pays d’Asie qui va s’investir localement et plus aux Etats-Unis et qui va tirer leur croissance économique».
Couplage ou non, selon Yves Zlotowski, économiste en chef à la Coface, «Les pays émergents asiatiques vont perdre un point de croissance lié à la crise économique américaine», ce qui est un moindre mal. Les projections de la Coface donnent ainsi une croissance 2008 à 7,7% en Asie, à 9,8% en Chine et à 8% en Inde.
En ce qui concerne l’Inde, Yves Zlotowski indique que la Coface est «très positive sur l’économie du pays même si sa croissance sera limitée à cause des problèmes d’infrastructures et de la dette publique qui est le double de celle de la moyenne des pays asiatiques». Mais, le bon point pour l’Inde est que sa croissance est «de moins en moins volatile avec des entreprises qui ont de moins en moins d’incidents de paiement».
En ce qui concerne la Chine, la Coface est plus réservée car elle note de plus en plus d’incidents de paiement des entreprises chinoises suite à leurs difficultés financières provenant d’une concurrence exacerbée sur le marché national et même si, pour l’instant, ces entreprises n’ont pas de mal à trouver des financements sur le marché local. «Il y a une situation tendue en Chine, explique Yves Zlotowski, avec une vraie panique des autorités par rapport à l’importante inflation, une inflation qui est inacceptable au niveau social».
Ainsi, la note «environnement des affaires» que donne la Coface est de A3 pour l’Inde et pour la Chine avec des fortes réserves sur la Chine. Cette note qui va de A à D (avec A1, A2, A3 et A4 pour le haut du tableau) prend en compte l’information financière disponible, l’environnement institutionnel et de niveau de recouvrement des créances.
Néanmoins, les spécialistes estiment que si la crise américaine devait durer toute l’année 2008, les conséquences pourraient être beaucoup plus importantes. Dans ce cas de figure, aucun d’entre eux ne s’avance à dresser un tableau de l’économie des pays asiatiques mais tous estiment que les fragilités au niveau des infrastructures et des systèmes financiers couplé avec un climat social qui pourrait rapidement se détériorer couplé avec une baisse drastique des exportations seraient à même de plonger le continent dans une crise de tous les dangers. Cependant, pour eux, ce scénario n’est actuellement pas du tout d’actualité.
Alexandre Vatimbella